11 jours et 7 heures, c’est le temps qu’il nous aura fallu pour traverser du Cap Vert à La Barbade, soit une vitesse moyenne de 7,6 nœuds (environ 170h sous spi).
Ce fut une belle traversée, et une belle expérience. Dans l’ensemble nous avons eu de bonnes conditions de vent et de mer. A quatre à bord, le temps est passé vite, l’ambiance était bonne, et le fait d’être à quatre fut plus reposant pour les quarts de nuit.
Petit résumé de ces 11 jours en mer :
Dimanche 16 décembre
Mindelo, 10h. Le dernier ravitaillement en produits frais est fait, tout est chargé, rangé, calé, il ne reste plus que le plein d’eau à faire. Problème : pas d’eau disponible au ponton depuis deux jours… C’est donc au port de pêche, situé un peu plus loin dans la baie de Mindelo, que nous faisons notre plein de 300 litres au moyen de bouteilles de 5 litres que nous allons remplir à un robinet (je vous laisse faire le calcul du nombre d’aller-retours…)
Enfin à 12h nous sommes fins prêts et c’est le départ. Nous prenons l’habituelle accélération du vent dans le canal entre Sao Vicente et Santo Antao (quand même moins fort que la première fois), mais quelques heures plus tard, plus rien sous le vent de l’île.
Passé le dévent, le vent remonte en fin d’après-midi à 15-20 nœuds d’E-NE.
La première nuit se passe calmement, sans le spi.
Lundi 17 décembre (jour 1 : 175 milles)
L’échauffement est terminé et les choses sérieuses commencent : le spi est envoyé dès le lever du jour. Le vent est au NE, 15 nœuds.
Dans la matinée, Pascal nous remonte deux dorades coryphènes, et dans la bataille nous perdons un seau (un de plus…).
Mardi 18 décembre (jour 2 : 193 milles)
Temps nuageux, vent faible de NE. Le spi est renvoyé dès le matin.
Journée tranquille. On rate une dorade qui se décroche.
En soirée, nous croisons la route d’un cargo, qu’Olivier contacte par VHF.
On garde le spi pour la nuit, et les capitaines m’offrent une nuit complète sans quarts à assurer, car je suis un peu crevée ! Toujours un peu de mal à trouver un rythme et à récupérer correctement.
Mercredi 19 décembre (jour 3 : 185 milles)
Sale journée pour la pêche : 3 bas de lignes cassés, par on ne sait quels monstres marins… Il ne nous reste plus qu’un seul leurre, qui jusque-là n’avait jamais fait ses preuves, mais qui nous permet d’attraper une dorade en fin d’après-midi. Elle tombe à pic pour le dîner !
La nuit est agitée. On prend quelques grains, sous lesquels le vent se renforce. Steph et Olivier affalent le spi vers 3h et on finit la nuit avec la GV et le génois en ciseaux.
Jeudi 20 décembre (jour 4 : 192 milles)
Le matin, la mer est encore forte, le vent E-NE 25 nœuds.
On sent une nette hausse de température, aussi bien de l’air que de l’eau.
Chaque jour, en progressant vers l’ouest, la nuit tombe un peu plus tard (et le jour se lève un peu plus tard lui aussi). .
Le vent mollit à 12 nœuds, le spi est renvoyé. Le drame : on se fait casser à nouveau notre ligne et on perd le dernier leurre qu’il nous restait… Pas cool.
En soirée, on attaque des parties de yam’s pour s’occuper.
La nuit est calme et reposante. On garde le spi et faisons chacun des quarts de 1h30. Avec la lune, la visibilité est excellente.
Vendredi 21 décembre (jour 5 : 184 milles)
Dès le matin, une journée très chaude s’annonce. Peu de nuages et un soleil qui tape fort.
Il faut trouver un moyen de pêcher ! Steph se lance donc dans la fabrication d’un leurre avec un morceau d’écoute rouge, qu’il effiloche (on avait lu ça sur internet, il paraît que ça marche !). Quelques écrous en guise de plombs, et cette fois on met un bas de ligne acier (merci papa…). Puis nous mettons tout ça à l’eau…
Nous passons l’après-midi entre siestes et « baignades » accrochés derrière le bateau, car il n’y a que mouillé qu’on arrive à rester sur le pont en plein soleil.
En fin d’après-midi l’élastique de la ligne se tend et Olivier remonte une grosse dorade coryphène, un beau morceau, la plus grosse pêchée jusqu’à maintenant. Super le leurre fabrication maison !!!
Il va cependant falloir qu’on trouve une autre technique pour tuer ces pauvres poissons, à qui à chaque fois on coupe sauvagement la tête alors qu’ils vivent encore (et qui continuent à se tortiller la tête coupée)… beurk !
Nouvelle soirée culinaire en perspective : papillotes de dorade à la tomate, papillotes au lait de coco, et marinade de poisson cru.
Et on arrose (sans alcool) la moitié du chemin parcouru, autour d’une partie de yam’s, puis d’un concert de jumbae improvisé sur casseroles!
Samedi 22 décembre (jour 6 : 166 milles)
Toujours sous spi, vent d’est 15/20 nœuds.
Dans la matinée on aperçoit un voilier à quelques milles au nord. Olivier le contacte par VHF : ce sont des Français, partis des Canaries et en route pour la Guadeloupe.
La journée est couverte et ponctuée de nombreux grains, nous amenant de grosses averses.
Le vent devient de plus en plus faible et en fin d’après-midi il tombe complètement. Le spi est affalé. L’horizon est chargé de nuages noirs et le vent passe au sud, avant de repasser sud-est puis à nouveau est. Avec ce temps perturbé nous gardons les voiles en ciseaux pour la nuit.
Dimanche 23 décembre (jour 7 : 153 milles)
Le ciel s’est à nouveau dégagé mais le vent reste faible. On renvoie donc le spi.
Dans la matinée le vent remonte et Thorsson file à nouveau entre 8 et 9 nœuds. Des conditions excellentes ! Une belle journée chaude, avec au programme alternance de siestes, baignades, lecture et barre.
Lundi 24 décembre (jour 8 : 184 miles)
Encore plus à l’ouest, et le décalage du lever du jour continue !
Les conditions de cette nuit ont été vraiment excellentes.
A 11h30 TU, comme chaque matin, nous captons la météo sur RFI, qui nous prévoit pour les 24h à venir du vent de SE 4 à 5. Etant positionné un peu plus au nord que la route prévue initialement, on ne pouvait espérer meilleure orientation pour venir se recaler sur notre route.
Nouveau drame en ce lundi matin : nous perdons notre dernier seau. Il repose désormais par 5 000 mètres de fond. (cela ne fera jamais que le quatrième depuis le départ de La Rochelle…)
En fin d’après-midi, nous entamons les préparatifs pour notre réveillon de Noël. Au menu : magret de canard fumé, foie gras et confitures de figues, confit de canard et pommes de terre. Pas de bûche glacée, ni de champagne, ni de vin.
Mardi 25 décembre (jour 9 : 159 milles)
Vent d’E faible, et très chaud. Une belle journée de Noël !
On installe une grande bâche en tissu pour faire un peu d’ombre dans le cockpit, car c’est intenable !
Notre vitesse atteint péniblement les 5/6 nœuds. Idéal pour la pêche ! On remet la ligne à traîner, et dans la matinée l’élastique se tend brutalement. Ça tire dur ! Steph remonte la ligne : c’est une énorme dorade coryphène ! Vraiment, le leurre que Steph a fabriqué s’avère terriblement efficace pour les grosses prises !
Steph vide et découpe la dorade avec l’aide de Pascal. Il y a à manger pour un régiment !
Ensuite un grand nettoyage du bateau s’impose, il y a du sang et des écailles partout ! Puis c’est ateliers cuisine : filets de dorade frits, dorade en papillotes, marinade, et rillettes de dorade ! Ça nous prend une bonne partie de la journée et pendant ce temps, le vent de SE est repassé au NE en se renforçant un peu. Thorsson continue de filer sous spi au 280°, entre 7 et 8 nœuds de vitesse.
Puis c’est une nouvelle nuit qui commence, la 10ème depuis le départ.
La nuit étant calme et dégagée, nous gardons le spi, continuant notre rythme de quart de 1h30 chacun. Mais pendant mon quart, de vilains nuages noirs se développent derrière nous en se rapprochant. Je réveille donc Steph, rejoint quelques minutes plus tard par Olivier. D’autres développements orageux apparaissent aux alentours, il faut être vigilent.
Finalement, le vent ne montera pas plus que ça, mais suffisamment quand même sous les grains pour que Thorsson se maintienne à une vitesse entre 7 et 9 nœuds.
Mercredi 26 décembre (jour 10 : 170 milles)
Nous approchons de l’arrivée…
N’ayant pas changé d’heure depuis le Cap Vert (TU -1h), la nuit tombe beaucoup plus tard à notre montre et le premier quart ne commence qu’à 22h (TU -1h), tandis que le dernier quart se termine à 9h le matin ! A vrai dire, l’heure en elle-même n’a pas vraiment d’importance puisque nos journées et nos nuits sont calées et organisés selon le soleil !
Encore une journée sous spi, et de plus en plus chaud malgré le vent de NE qui souffle aujourd’hui entre 15 et 20 nœuds.
Au menu de tous nos repas, c’est dorade coryphène à toutes les sauces ! Si seulement on pouvait pêcher des côtes de bœuf…
Le bateau va avoir besoin d’un bon nettoyage en arrivant ! Ça pue le poisson, et par terre ça colle, il y a du riz (suite à une chute de casserole), du pain, du jus de poisson, de l’eau de mer… Les draps, duvets, shorts et tee-shirts sont salés, humides, pleins de crème solaire…
Nous changeons finalement d’heure : on recule la montre la montre de 3h, nous sommes donc désormais à TU-4h. Nous gardons le spi toute la journée. Mais en première partie de nuit, après de longs surfs entre 13 et 14 nœuds, Steph et Olivier l’affalent, le vent montant de plus en plus et la mer devenant forte. En plus, la lune se lève tard et il fait noir noir noir ! On finit donc la nuit avec génois et GV (1 ris) en ciseaux. Le vent se maintient entre 20 et 25 nœuds et le bateau est dur à la barre. Il manque de puissance mais part comme une luge dans les vagues, avec des pointes entre12 et 13 nœuds.
Jeudi 27 décembre (jour 11 : 194 milles)
Une belle moyenne sur ces dernières 24h !
A 9h (heure locale), il nous reste 63 milles à parcourir. Le vent se maintient à 20/25 nœuds et la mer reste forte. Un concours de pointe de vitesse s’organise à bord et Olivier le remporte avec une pointe à 15,1 nds. Puis la dernière journée se poursuit sous pilote automatique, qui fait de belles embardées avec la houle croisée (ce qui permet à Pascal de faire une jolie figure de style en glissant sur la semoule qui s’est renversée dans le fond du bateau.)
A 13h30, on commence à apercevoir l’île de La Barbade. On arrive !
A 16h, après avoir longé la côte est de l’île, nous jetons l’ancre dans la baie de Bridgetown, où nous attend l’équipage de BelleGaff.
Du vendredi 28 au dimanche 30 décembre
Nous voilà donc à La Barbade depuis 3 jours, et nous nous y plaisons bien !
Il fait chaud (quelques averses viennent parfois nous rafraîchir un peu), l’eau turquoise est à 27/28°C, le sable est blanc et fin comme de la farine, on nage parmi les tortues et les poissons tropicaux autour du bateau et on fait des dégustations de rhum local avec l’équipage de BelleGaff (la nuit tombe à 18h, il faut bien s’occuper… à consommer avec modération cependant…)
Les habitants ici sont d’une gentillesse incroyable, aimables, tout sourire, et toujours prêts à rendre service.
Les différentes villes de l’île sont très animées, et nombre de signes rappellent nettement la culture anglaise (magasins, nourriture, décorations de Noël,…), à laquelle se mêle une joyeuse ambiance, musique, rastas à tous les coins de rue, petits étalages de fruits, légumes, cacahuètes, sucreries, colliers… Il en ressort un joyeux tumulte et une atmosphère qu’on va qualifier de « no stress » ! Cependant, se balader en ville la nuit est fortement déconseillé…
Samedi nous avons pris le bus pour nous balader un peu dans l’île. Les chauffeurs ont une conduite plus que sportive. On pense que pour obtenir leur permis ils doivent sans doute aller le plus vite possible, freiner toujours au dernier moment, klaxonner cinquante fois à la minute et avoir la musique à fond (et bien sûr rouler à gauche).
L’île est très verte, bordée de belles plages de sable blanc avec les inévitables cocotiers !
Nous allons fêter le 1er de l’an ici, puis d’ici quelques jours nous remonterons vers la Guadeloupe.
Bonne annee a tous ! Et merci pour tous vos petits messages !